Une brève histoire de la mandoline napolitaine

L’histoire fascinante de la mandoline napolitaine : Origines, expansion et évolution

Instrument emblématique de la musique italienne, la mandoline napolitaine s’est imposée dès le XVIIIe siècle comme un symbole d’élégance et de virtuosité. Grâce à son timbre unique et son association avec la musique classique et populaire, elle a conquis de nombreux pays et compositeurs. Cet article explore son origine, son expansion en Europe et au-delà, ainsi que les évolutions techniques qui ont façonné son histoire.

1. Origines de la mandoline napolitaine

L’histoire de la mandoline napolitaine commence avec les instruments à cordes pincées utilisés en Italie du Sud dès le Moyen Âge. Parmi eux, le colascione, un luth long à cordes métalliques, et la guitare napolitaine à cordes en métal ont influencé son développement.

C’est au XVIIIe siècle, à Naples, qu’apparaît la première mandoline napolitaine moderne, caractérisée par sa table bombée et ses cordes métalliques, permettant un son plus brillant et une meilleure projection sonore. L’instrument s’inscrit dans une tradition musicale déjà riche en Italie, où la recherche d’un équilibre entre expressivité et puissance sonore était au cœur des préoccupations des luthiers. Son développement est également lié à l’essor de la musique baroque et à la montée en popularité des instruments à cordes pincées dans les cours européennes.

La mandoline napolitaine a émergé dans un contexte où la musique italienne rayonnait à travers l’Europe. Les musiciens italiens étaient très demandés dans les cours royales et les salles de concert, contribuant à la diffusion de cet instrument dans les milieux aristocratiques et bourgeois.

2. L’influence des luthiers napolitains

Le perfectionnement de la mandoline napolitaine est largement attribué à la famille Vinaccia, en particulier Gaetano Vinaccia, qui en développe un modèle en 1744. Ce modèle introduit plusieurs innovations :

  • Table inclinée pour une meilleure résonance et permettre l'utilisation de cordes métallique appliquant une tension pus forte sur la table. 

  • Utilisation des cordes métalliques.

  • Tension plus élevée des cordes, facilitant le jeu rapide, le trémolo et la projection sonore. 

Les Vinaccia furent de grands innovateurs et tinrent un rôle déterminant dans l’histoire de la mandoline. Gennaro et Antonio furent parmi les premiers à revoir les proportions de l’instrument baroque. Il a été observé que les mandolines d’Antonio Vinaccia – que beaucoup considèrent comme les plus abouties – sont légèrement plus grandes que celles de Gennaro.

De manière générale, ce nouveau modèle de mandoline se distingue par sa table élargie et son chevalet rehaussé (il était jusque-là positionné très bas). Entre le chevalet et la bouche, on trouve désormais une plaque d’écailles ou de bois, de manière à éviter à ce que l’instrument ne subisse des dommages. En effet, celui-ci est à présent joué à l’aide d’un plectre car ses cordes en boyau ont été remplacées par des métalliques, accordées en quintes comme le violon – facilitant son jeu pour un grand nombre de musiciens.

La caisse est construite à partir de bois courbé appelé “côte”, et la table d’harmonie – auparavant plate – s’incline à partir du chevalet, au niveau de sa largeur maximale. La tête si caractéristique de la mandoline milanaise est devenue trapézoïdale, à la manière de celles des guitares. Enfin, des frettes supplémentaires ont été ajoutées pour étendre la gamme de l’instrument.

Toutes ces innovations ont permis à la mandoline, pourtant jusque-là boudée par les illustres institutions qu’étaient les quatre conservatoires napolitains, d’attirer l’attention des compositeurs et musiciens et d’entrer à l’orchestre de l’opéra. Signe de la nouvelle estime dont jouissait alors l’instrument, des méthodes pour mandoline apparaissent simultanément à cette époque.

L’une des plus connues, celle de Gabriele Leone publiée en 1768 – soit trois ans avant la construction du modèle d’Antonio Vinaccia de la vente du 5 novembre 2022 – présente une gravure du nouvel instrument qui, au regard de celui en vente, ne laisse aucun doute sur le rôle d’Antonio Vinaccia dans l’élaboration de la mandoline napolitaine.

3. Expansion en Europe et essor au XVIIIe siècle

La mandoline napolitaine ne tarda pas à traverser les frontières italiennes et à séduire un public plus large. Elle connut une grande popularité en France, notamment à Paris où elle devint un instrument prisé des salons aristocratiques.

Des virtuoses comme Leone, Cifolelli et Nonnini se produisirent aux Concerts Spirituels, obtenant un succès considérable. Cet engouement se traduisit par une forte production musicale : près de 85 volumes de musique furent publiés en France entre 1760 et 1785.

Lyon, deuxième ville musicale du pays, devint également un centre majeur pour la mandoline avec des compositeurs et pédagogues tels que Fouchetti et Verdone. L’instrument trouva sa place dans les cercles aristocratiques et auprès des amateurs éclairés, contribuant à sa diffusion à travers toute l’Europe.

L’essor de la mandoline en Europe fut également favorisé par son association avec des compositeurs influents qui l’introduisirent dans des œuvres orchestrales et de chambre.

4. Adoption dans d'autres régions du monde

En dehors de la France, la mandoline napolitaine trouva des adeptes en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Russie et en Amérique du Nord. Sa popularité fut renforcée par des compositeurs de renom tels que Mozart, Beethoven, Hummel et Verdi, qui composèrent des pièces pour cet instrument.

En Russie, un mandoliniste du nom de Zaneboni participa activement à l’essor de la mandoline, influençant des musiciens comme Giovanni Paisiello, qui utilisa l’instrument dans certaines de ses compositions lyriques.

La mandoline s’intégra également dans les répertoires folkloriques de plusieurs pays, fusionnant avec des traditions musicales locales et trouvant sa place dans des ensembles populaires et orchestraux.

5. Construction et évolution de l’instrument

Avec son succès croissant, la mandoline napolitaine subit diverses améliorations techniques :

  • Matériaux nobles : utilisation de l’érable, du palissandre et du sycomore pour la caisse.

  • Table d’harmonie en bois de pin pour une meilleure projection sonore.

  • Touche incrustée d’ivoire et frettes métalliques pour une plus grande précision de jeu.

  • Accordage en quintes (sol, ré, la, mi) facilitant l’adoption par les violonistes.

Cependant, au XIXe siècle, l’instrument perdit en popularité face à l’essor du piano et du violon. Il connut toutefois une renaissance à Prague et Vienne, où des compositeurs comme Johann Hoffmann continuèrent d’écrire pour lui.

De nos jours, la mandoline napolitaine demeure un instrument prisé, avec une fabrication modernisée intégrant des techniques contemporaines. L’intérêt pour la musique ancienne et les instruments historiques contribue également à son renouveau.

En somme, la mandoline napolitaine, grâce à son timbre unique et son riche patrimoine musical, demeure une icône de la musique classique et traditionnelle. Bien que son apogée ait eu lieu au XVIIIe siècle, elle continue d’influencer de nombreux musiciens et compositeurs à travers le monde. Aujourd’hui, elle connaît un regain d’intérêt dans les ensembles de musique baroque et folklorique, ainsi que dans certaines expérimentations contemporaines.